Au bord du lac Titicaca

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Cinq jours ! Nous sommes restés cinq jours à Juliaca. La faute à quelques imprévus, dont notamment un bon gros coup de fatigue pour Marie. Mais malgré le chaos de cette ville, nous étions bien, très bien même, dans la Casa de Ciclista de Geovani. Rien de luxueux, mais Geovani nous reçoit avec beaucoup de gentillesse et de simplicité. « Vous avez besoin de plus de repos ? Pas de souci, vous pouvez rester autant que vous le voulez, considérez que vous êtes ici chez vous ! ». Alors, nous prenons le temps, en effet. Le temps de faire le nécessaire : lessives, courses, leçons, petites réparations, etc. Le temps de se reposer. Le temps de rencontrer les nombreux cyclo-voyageurs qui passent par la Casa de Ciclista, au moins un nouveau chaque jour, en provenance d’Argentine, de Suisse, d’Écosse, de Suède… Le temps de bricoler avec Geovani aussi. Menuisier de son état, il a de l’or au bout des doigts. Il nous apprend à réaliser des petits porte-clés-vélos en fil de fer, il coud des sacoches de guidon aux enfants pour leur plus grand plaisir.

Et bien sûr, le temps aussi de profiter de cette ville, moche, chaotique mais très vivante. Nous limitons nos balades au centre-ville, mais cela suffit à nos yeux et nos oreilles. Les rues sont encore plus encombrées que ce que nous avons l’habitude de voir au Pérou, les travaux de voirie sont omniprésents, le ballet des tuk-tuks est très très dense. En ce qui concerne les accès PMR, heuuuu, on en est loin. Encore plus qu’ailleurs, nous regardons avec beaucoup d’attention avant de traverser la route ! Mais il y a de la vie, ça fourmille ! Nous avons la chance d’assister à un défilé à l’occasion de l’anniversaire de la ville. Accompagnés par des fanfares, des femmes, des hommes et parfois même des enfants défilent en dansant, parés des pieds à la tête de costumes plus clinquants les uns que les autres. Ça brille, ça danse, ça chante, ça joue de la musique très fort, c’est vraiment sympa d’assister à ce spectacle !

Enfin, le 12 octobre, nous reprenons la route en direction du lac Titicaca, et en compagnie de Geovani qui nous guide dans le dédale de la sortie de Juliaca. Et on est bien content, car la sortie de la ville est à l’image du centre : un énorme bazar qui échappe à toute notion d’organisation. Les constructions échappent à toute notion d’urbanisme, chacun construit comme il peut / veut où bon lui semble dans l’anarchie la plus totale, les vendeurs de rue sont installés un peu partout sur la chaussée… Les rues sont également jonchées de déchets. Pfiouuu, chaud comme sortie de ville !

Nous sommes motivés pour nous extraire de tout ça rapidement, retrouver la campagne, mais surtout pour atteindre enfin les bords du lac Titicaca ! La route depuis Juliaca ne présente pas d’intérêt, mais rapidement, nous apercevons la péninsule de Capachica, notre objectif que nous atteignons en début d’après-midi après 55 km. Trop fort ces enfants ! Nous étions déjà passés par cette péninsule il y a 14 ans, mais nous avions vraiment envie de faire découvrir ce lieu très paisible aux enfants. Sur les conseils de Geovani, nous installons notre campement sur la propriété de Valentin et sa famille. La population de Capachica, et plus spécifiquement celle de Llachon, présente la spécificité de gérer la ressource touristique de façon communautaire. Ils reçoivent des touristes (apparemment beaucoup de Français) qui sont répartis dans les familles de façon équitable, ceux qui ne peuvent recevoir des touristes chez eux (maison trop loin, trop petite) vendent leur artisanat dans une boutique en face de la mairie. Nous plantons donc la tente sur une petite terrasse en hauteur face au lac, vue imprenable garantie ! C’est magnifique !

Enfin, avant de planter la tente, nous commençons d’abord par le plus important : un baptême rafraîchissant dans les eaux du Titicaca ! L’eau est fraîche, transparente, on a une belle plage de sable fin et blanc, c’est le bonheur ! On est à environ 3800 m d’altitude quand même ! Le lendemain, après avoir dit au revoir à Geovani qui rentre travailler à Juliaca, nous marchons jusqu’à un joli point de vue au bout de la péninsule. Les bleus du lac sont magnifiques, bleu profond et métallique en son centre, bleu presque turquoise sur les plages de sable. Sur terre, l’ambiance est très tranquille. La journée, les gens travaillent leurs parcelles agricoles, souvent de façon manuelle. Les collines sont sculptées par un enchevêtrement de terrasses et de petits chemins de pierre, les animaux paissent tranquillement. Tout invite à la contemplation ! Rapidement, l’évidence se fait : on reste une journée de plus. Cela nous permet de faire un pique-nique sur la plage le lendemain midi, que nous prenons en compagnie de Tupac, petit-fils de Valentin, avec qui Sofia passe beaucoup de temps à s’amuser. Et alors que la journée a été magnifique, la nuit suivante, nous nous prenons un orage mémorable sur la tête ! Vent super fort, pluie, grêle et enfin éclairs, tout y passe. Les derniers éclairs tombant très près de la tente, nous rentrons nous abriter un temps dans la maison à côté de laquelle nous campons, histoire de rassurer les enfants qui commençaient à avoir très peur.

Après cette nuit pas vraiment reposante, nous reprenons la route. Nous voulons contourner le lac par le nord et passer en Bolivie par la petite frontière de Tilali, ce qui était beaucoup plus compliqué il y a 14 ans car il n’y avait pas de poste frontière à cet endroit. En partant de Capachica, la route est sublime : nous commençons d’abord par quelques kilomètres à flanc de montagne, entre les eucalyptus et leur merveilleux parfum. On se croirait parfois en Méditerranée ! Puis la route redescend au niveau du lac, coincée entre le bas des collines et les parcelles agricoles. C’est tellement paisible, et les personnes rencontrées sont très amicales. Nous nous arrêtons de temps en temps pour papoter avec quelques curieux. Les gens vivent ici de l’agriculture, et leurs moyens de travail sont pour le moins rudimentaires. Nombreux sont ceux qui font tout à la main et travaillent la terre avec leurs animaux. Un petit virus doit encore circuler parmi nous car nous sommes fatigués les uns après les autres, mais le moral reste bon.

Nous passons rapidement la grande plaine au nord du lac en passant par Taraco et Huancané et retrouvons ensuite avec le relief sur la rive est du lac. Quel plaisir ! Le relief est raisonnable, la route est belle, c’est vallonné, nous longeons la plupart du temps la rive du lac et ses eaux toujours aussi belles. Et en plus, il fait relativement beau ! On en profite à fond. Moho, Conima, et enfin nous arrivons à Tilali. Les derniers kilomètres étaient vraiment très beaux, nous décidons de rester une journée à Tilali avant de passer la frontière. La pluie diluvienne qui nous réveille au matin nous conforte dans notre choix. Rien de bien exceptionnel dans ce petit village, on aurait dit que c’était « opération ville morte » tellement c’était vide, à priori car la majorité de la population était invitée à un mariage. Mais le paysage aux alentours valait bien une petite balade.

Le 20 octobre, nous passons notre première frontière terrestre de ce voyage. Les enfants y découvrent les formalités administratives, les barbelés, l’office de migration puis la douane, mais ça reste facile en vélo, et c’est vraiment une toute petite frontière avec peu de passage, ça va donc vite. Une fois les tampons de sortie du Pérou obtenus, nous ne sommes donc administrativement dans aucun pays pour quelques kilomètres. Il nous faut remonter à un petit col, asphalté tout d’abord jusqu’à la frontière physique. Ça y est, nous en sommes en Bolivie ! Le panorama est vraiment superbe, avec une vue incroyable sur le lac. Maiiiis, bye bye le goudron ! Littéralement à la borne frontière, l’asphalte laisse place à une piste de ripio. Après quelques belles montées et une séance de relais pousse-pousse pour hisser les vélos, nous redescendons en direction de Puerto Acosta pour y faire les formalités, cette fois côté bolivien. Le fonctionnaire en poste, en plus de nous vendre des cartes SIM inutilisables pour nos téléphones, nous fera bien marrer car en plus de tamponner nos passeports, il tient également la boutique attenante (nourriture, boissons, etc), peut faire des photocopies, du change et tient pour finir les toilettes publiques à côté !

Ce jour-là, nous poussons jusqu’à Iquipuni pour dormir proche des rives du lac. Tout le monde nous a prévenu, le vent souffle très fort le soir, nous cherchons un endroit où poser la tente à l’abri. Ce sera donc sur le terrain d’un centre de santé ce soir. La route défile, le temps reste beau. Le jour suivant, nous nous arrêtons tôt à Puerto Carabuco, histoire de profiter d’une dernière balade au bord du lac Titicaca. Puis, pour notre dernier jour au bord du plus « haut lac navigable du monde » (selon des critères bien précis, car des bateaux de pèche naviguent aussi sur le lac Yauriviri situé 500 mètres plus haut par exemple), nous visons une grande journée avec pour objectif atteindre Achacachi (à tes souhaits). Après une bonne grimpette jusqu’à Sisasan, nous nous laissons glisser jusqu’à Ancoraimes.

Nous laissons la parole à Alicia qui voulait raconter une anecdote :


Après 18 kilomètres passés depuis le début de la journée, un brave petit chien commence à nous suivre. Il ressemblait à un petit Golden Retriever, presque blanc, avec des yeux couleur noisette. Ce petit chien est assez rigolo mais un peu bêta. Il voulait vraiment manger donc il a fini par nous chiper un sac de pains pendant le pique-nique, après avoir endormi notre méfiance. Il était peureux car quand on a approché la gourde pour lui verser de l’eau dans une barquette plastique que nous avons trouvé par-terre, il partait.

Il était bêta parce qu’il se jetait en aboyant sur les voitures qui nous doublaient pour nous “protéger”, sur les motos et aussi sur les autres cyclistes. Et après, il nous regardait fièrement. Nous avons fini par le surnommer Valiente (en espagnol, ce nom signifie courageux) car il nous a accompagné pendant environ 30 kilomètres, en courant ou trottinant derrière nous. Il a fini par arrêter de nous suivre car nous allions trop vite, poussés par le vent.

Alicia


Cette dernière après-midi, malgré le fait d’être accompagnés par Valiente bien sûr, est vraiment rude. Le vent souffle très fort de côté, rendant la conduite sur la route un peu dangereuse à chaque passage de camion. En plein milieu d’une grande ligne droite, la chaîne d’Olivier casse. Nous voilà fatigués, en plein vent, au milieu de pas grand-chose, avec 3 enfants (heureusement très patients) et un chien… Heureusement, nous avons le matériel nécessaire : Olivier raccourci un peu sa chaîne et nous voilà repartis. Et rapidement, alors que l’après-midi était mal engagée, la route nous fait prendre un virage à 90 degrés, nous voilà lancés avec un bon vent de dos ! Nous avalons très rapidement les 13 kilomètres nous séparant d’Achacachi, et arrivons à un endroit pour dormir que nous avions repéré avant d’arriver : l’hostal de Milton, bâtiment dans lequel se trouvent également deux terrains de sport et une piscine. Et parce que c’est la Bolivie, nous sommes invités à entrer nos vélos littéralement au bord de la piscine, où nous pourrons dormir. C’est ainsi que dans une même journée, nous sommes passé du stade « Petite galère au milieu de la pampa », au stade « Plouf dans la piscine et détente au sauna » en 90 minutes de temps… C’est ça le voyage à vélo !!

Nous restons à barboter dans la piscine de Milton, dans une atmosphère tropicale, le lendemain. Pour la suite, nous savons qu’au sortir d’Achacachi, la route devient autoroute, puis que nous attend l’entrée apocalyptique dans la Paz via El Alto (expérimentée il y a 14 ans, aucune envie de recommencer). Nous décidons donc de prendre un minibus pour arriver à La Paz en toute sérénité, et surtout en entier.

Nous sommes donc à La Paz depuis le 24 octobre, où nous sommes en train d’échafauder nos plans pour la suite. Mais ça, c’est pour un prochain épisode !


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