Samedi 23 août, nous sommes au taquet (comme la veille), les sacoches sont prêtes (comme la veille) et nous aussi (comme la veille). Nous savons que nous allons rencontrer peu d’eau sur la route durant les deux prochains jours alors nous sommes chargés comme des mules avec 22 litres d’eau répartis dans les gourdes et différentes poches à eau, plus la nourriture. Ce sont les premiers jours, on se teste sur les quantités, sauf que le test va se faire dans des conditions assez extrêmes en termes de difficultés. Mais bon, grâce aux sites de différents autres cyclos (un grand merci à Gwenaëlle et Pascal notamment) qui ont pris le temps de bien documenter l’itinéraire, nous savons à peu près à quoi nous attendre. On se rend bien compte que la barre est haute pour un début, surtout que c’est la première fois que nous allons affronter en famille autant de dénivelé. Nous n’avons aucune idée de comment vont réagir les enfants. De toute façon, on y est, alors c’est parti !
La montée commence dès Nazca, et nous savons grosso modo que nous n’aurons rien d’autre que du dénivelé positif pendant environ 100 km. Le paysage est vraiment très sec, autour de nous, il y a seulement de la rocaille et de la poussière, à l’exception du fond de vallée où se trouvent encore pendant plusieurs kilomètres des cultures. Mais en montant, les seules traces de végétation que nous pouvons voir ne sont rapidement que des cactus. Nous sommes loin d’être seuls car nous sommes la Transoceanica, qui relie le Pacifique à l’Atlantique, il y a donc une quantité de poids lourds assez invraisemblable. Ils sont d’ailleurs vraiment super sympa : malgré le trafic, ils font dans l’ensemble vraiment attention à nous, nous dépassant avec précaution, quitte à se mettre à l’arrêt pour nous mettre en sécurité. Nous recevons aussi beaucoup d’encouragement, de coucous de la main, cela amuse beaucoup les enfants et les motive. Le seul inconvénient est le bruit que cela génère, bon, on fera avec.
Au bout d’une dizaine de kilomètres, la pente forcit et les lacets commencent. Nous avons en tête d’atteindre le kilomètre 23, où nous savons que nous trouverons un lieu possible pour y poser nos tentes, le seul à la ronde. Sauf que. Sauf que nous faisons connaissance avec des graines que nous ne connaissons pas et qui ont la fâcheuse caractéristique d’être en forme de grosse épine. Épines qui viennent se loger où ? Vous avez trouvé ! Dans nos pneus bien sûr ! Et alors que le temps passe et que je (Marie) suis en pleine réflexion existentielle sur le bien fondé de ce choix de départ, nous crevons deux pneus simultanément, en plein milieu d’un lacet. Des dizaines d’épines transforment le pneu avant d’Olivier en une sorte de passoire. Et c’est parti pour des changements de chambre à air et de pneu juste au bord de la route, sous les encouragements des chauffeurs de poids-lourds qui ne cessent de passer. Il ne faut pas traîner car la brume monte et le soleil descend. Il fait déjà sombre à 17 heures.
Les enfants nous bluffent par leur patience et leur endurance. Ce n’est que le début, nous verrons bien si l’enthousiasme demeure, mais ils sont incroyables. Pourtant, le dénivelé est vraiment important, et surtout, une fois reparti, on peut voir de trèèèèès loin là où nous montons, ce qui peut-être assez effrayant. Finalement, nous atteignons notre objectif : un bivouac mille étoiles, cachés près de ruines, avec vue imprenable sur la vallée et les lacets que nous venons de parcourir. Le premier bivouac se monte, nous sommes tous un peu euphoriques de cette première journée et de ce spot pour la nuit. Tout le monde est fatigué et à 20h30, tout le monde est couché.
Le deuxième jour, nous débutons la journée par… une crevaison : avant même le départ, un des pneus de Nahuel est à plat, encore ces fichues épines ! Nous redémarrons l’ascension. C’est dur, mais tout le monde est motivé. Après avoir atteint une sorte de plateau en pente plus douce, nous nous arrêtons boire un soda bien frais dans un petit “resto”, autant pour se donner un peu d’énergie que pour se faire plaisir. Encore une fois, le dénivelé pour une bonne partie de la journée se voit de loin. Très gentiment, Herbert, le propriétaire, nous offre une boisson maison, du cebada, de l’orge infusée, que seul Olivier boit. La journée se déroule sans encombres, nous parcourons kilomètres après kilomètres, les enfants sont vraiment extraordinaires. Allez, si, encore une petite crevaison !!! Olivier à l’air de peiner un peu plus, mais bon il est vraiment chargé, il faudra qu’on revoie la répartition de la charge et les quantités de nourriture à emporter.
Quand même, au bout d’un certain temps, il montre des signes de fatigue plus poussés, Sofia finit par descendre pour marcher à côté de son petit vélo (elle marchera en fait vaillamment plusieurs kilomètres pour aider son papa). Je (Marie) sens bien que quelque chose ne tourne pas rond. Les derniers kilomètres avant notre objectif du jour (le hameau de Flor de Huallhua) sont plus difficiles, Olivier peine vraiment. Et à moins de 500 mètres de l’arrivée, il s’arrête, blanc comme un linge et s’allonge sur le bas-côté sans réussir à se relever. Petit coup de stress, les enfants sont inquiets de la situation. Au moins, Olivier a eu la bonne idée de faire ça littéralement au pied d’une borne d’appel d’urgence. Après quelques longues minutes, Olivier réussit à se relever, et après un bon vomi, la caravane se remet en marche en mode très ralenti. Nous atteignons finalement Flor de Huallhua, où Francisca et Valentino (un couple de personnes âgées) nous permettent de dormir dans le petit auvent devant leur échoppe. Olivier est cuit, il passe sa soirée allongé sans pouvoir rien faire. Le cebada, sûrement préparé avec une eau pas vraiment nickel, et l’effort physique poussé ont eu raison de lui…
Petite galère donc car nous sommes au milieu de nulle part, le dénivelé à faire et la distance à parcourir avant d’atteindre une petite ville où se poser sont trop importants. Nous décidons donc de faire une journée de pause à Flor de Huallhua, d’autant que Francisca nous autorise à rester.
Le lendemain, Olivier semble aller mieux. Nous nous motivons donc à repartir en visant une petite journée de 9 km. Mais même au bout de ces 9 km, Olivier n’en peut plus, nous avançons vraiment très très lentement et Sofia, heureusement est volontaire pour beaucoup marcher. Ce n’est vraiment pas idéal, Olivier a toujours une forte nausée et ne peut rien avaler. De mon côté, je n’ai aucune envie de refaire une reconstitution de notre épisode mexicain où Olivier avait fini en urgence à l’hôpital suite à des désordres gastriques similaires sans avoir rien pu avaler pendant cinq jours de vélo. La décision est prise, on va faire du stop jusqu’à Puquio. Je (Marie) lève le pouce au bord de la route et au bout de 20 minutes, José s’arrête avec son camion-benne de transport de gravats vide, nous y jetons nos sacoches, nos vélos, Olivier et Nahuel, et nous nous installons avec Alicia et Sofia dans la cabine.
Nous sommes un peu dégoûtés car nous avions fait le gros de la montée, et les paysages que nous traversons sont incroyables. Rapidement, nous arrivons à un haut plateau à l’herbe rase, nous voyons des dizaines de vigognes, la vue est incroyable, nous sommes à plus de 4000 m d’altitude maintenant. Puis nous entamons une descente superbe, de beaux lacets qui serpentent jusqu’au bas de la prochaine vallée. Les arbres refont leur apparition avec beaucoup d’eucalyptus, les petits villages aussi, des petites parcelles cultivées de part et d’autres de la rivière (oui, de l’eau !). José est vraiment sympa, il nous dépose à la sortie de Puquio et, le temps de décharger les affaires et de réinstaller les sacoches, nous trouvons un hostal. Nous sommes donc actuellement à Puquio où Olivier se repose et recommence tranquillement à manger. Le petit hostal où nous sommes, Sarita, est vraiment très tranquille, tout le monde recharge les batteries pour la prochaine étape.
La suite au prochain épisode !
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