Bonjour à tous. Voici pour aujourd’hui un petit article hors-série duquel vous pourrez vous inspirer, si le cœur vous en dit, pour cuisiner dans des conditions similaires à celles que nous rencontrons depuis quelques mois. Bienvenue dans un épisode de “vis ma vie” !
Les ingrédients
Faisons simple :
- des pâtes (environ 500 g pour deux adultes et trois enfants)
- un ou deux gros oignons
- du sel
- de l’huile
- du fromage, acheté au marché, non pasteurisé et transporté à température ambiante
- en option : une sauce industrielle (tomates ou mayonnaise par exemple)
Le matériel
- une casserole toute simple, avec le fond le moins épais possible – de la simple tôle – et évidement sans revêtement anti-adhésif (sinon il sera difficile de faire accrocher les oignons)
- un feu, si possible non réglable, mais surtout bien plus petit que le diamètre de la casserole
- un petit couvercle de boîte en plastique type Tupperware, qui servira de planche à découper
- des assiettes en plastique (sinon la vaisselle sera trop facile, c’est sur le plastique que le gras s’accroche le mieux)
- et enfin, pour les besoins de la simulation : un thermomètre de cuisson
La recette
Première étape : choisissez votre altitude. Cela impactera la température d’ébullition de l’eau (ie. température maximum qui vous ne devrez pas dépasser) :
- 4500 mètres d’altitude (notre bivouac le plus haut à date) : 85 degrés Celsius
- 4000 mètres (la moyenne de ces derniers temps) : 86,6 degrés Celsius
- autres : https://deleze.name/marcel/physique/TemperatureEbullition/Table_temperature.html
Version 1 – on a le temps
- Émincer les oignons et les faire revenir dans la casserole à feu très vif (rappelez-vous, la puissance d’un réchaud n’est que peu réglable) avec de l’huile d’olive. Surveillez attentivement et remuez constamment. Une fois les oignons bien
accrochés au fonddorés, réserver. - Mettre un fond d’eau et gratter le fond de la casserole avec la spatule de bois ou une cuillère en métal pour décrocher ce qui a attaché.
Version 2 – plus rapide
- Mettez l’eau à “bouillir”, c’est-à-dire jusqu’à atteindre la température maximum possible pour l’altitude simulée
- Émincer les oignons et les jeter directement dans l’eau qui chauffe tranquillement
Et on continue
- Une fois que l’eau a atteint sa température maximum, ajouter le sel et les pâtes
- Attendre… remuer de temps en temps pour éviter que les pâtes ne s’agglutinent ou ne s’accroche au fond, surtout tant que l’ébullition n’a pas repris
- Attendre encore… Vous aviez le réflexe de goûter les pâtes au bout de 7 minutes ? Pas le peine de le faire avant 10 – 12 minutes, voir 15 minutes s’il y a du vent.
- Une fois les pâtes cuites ou votre patience (ou celle des estomacs sur pattes qui vous tiennent lieu d’enfants) épuisée, videz l’eau de cuisson dans la boîte en plastique. Elle vous sera d’un grand secours pour la vaisselle.
- Servir chaud, avec des petits cubes de fromage et la sauce. Cette dernière devrait se révéler décevante pour plus de réalisme (bonne odeur mais goût de terre par exemple).
Quelques variantes
Toutes ces variantes ont été testées et validées en condition. N’hésitez pas à les utiliser, les combiner, etc.
Réchaud encrassé donc moins puissant
Variante assez simple : il vous suffit de limiter la puissance de votre feu suffisamment pour ne jamais atteindre la température maximale. Le critère d’arrêt de la “cuisson” (aussi appelé “ramollissage-réchauffage” dans ces conditions) sera en général la patience, ou… le déclenchement de la variante suivante…
Réchaud qui s’arrête en pleine cuisson
Variante pas trop compliquée non-plus. Arrêtez votre feu de temps en temps (disons toutes les 3-4 minutes par exemple, et pour une durée d’une minute à chaque fois). Dites-vous qu’en conditions “réelles”, on ne sait jamais si on va réussir à le redémarrer ce fichu réchaud.
L’usage (fort risqué) de pâtes dites « 3 minutes »
Variante à réserver aux personnes qui n’ont pas peur de prendre des risques culinaires élevés, et qui ont l’estomac ainsi que les dents bien accrochées.
Tout simplement : utiliser des pâtes « 3 minutes », ce produit à rendre dépressif un Italien. Mode opératoire : quand toutes les pâtes se sont agglutinées les unes aux autres, il n’y a plus rien à faire sinon annoncer aux convives que ça va être très très décevant. Servir chaud, avec couteaux et fourchettes, essuyer les critiques sans mot dire (mais maudire intérieurement l’inventeur de cette ignominie, ça fait du bien).
L’usage (un peu longuet) de pâtes prévues pour cuire en 13 minutes
Variante à réserver à ceux qui cherchent comment occuper leurs longues soirées d’hiver. Si vous trouvez des pâtes de ce type chez vous, déjà bravo (sinon vous pouvez passer commande auprès de la Dring Team) ! Ensuite : bonne chance, attention à ne pas vous endormir pendant la cuisson.
Pour approfondir : la vaisselle
C’est bien de prendre un bon/réconfortant/décevant repas bien chaud, mais c’est encore mieux de faire la vaisselle ensuite.
Point commun à toutes les variantes : n’utilisez pas de produit vaisselle ni de savon ni autre détergeant. Ça demande trop d’eau de rinçage et ça évite de répandre ces produits près d’un cours d’eau. Vous pouvez vous autoriser l’usage du sable si vous en avez à disposition.
Le secret d’une vaisselle bien faite (enfin ce que nous appelons “vaisselle” mais qui n’est ni plus ni moins qu’un bon vieux rinçage finalement), c’est l’essuyage au torchon. Vous prendrez soin de laver les torchons au moins une fois tous les quinze jours pour des raisons d’hygiène…
Dans des toilettes publiques bien sales
Un grand classique que vous pouvez certainement tester pas loin de chez vous. Choisissez le lieu adapté (toilettes de la gare, de station de bus ou métro, ou toilettes publiques dans votre ville). Il ne suffit que d’un minuscule lave main, avec un tout petit robinet beaucoup trop proche du mur.
La contrainte principale, c’est l’hygiène. Faite appel à votre imagination pour vous organiser.
Sans eau
Que ce soit au Pérou ou en Bolivie, quand on a de l’eau sous la main, on ne procrastine pas. Qu’il s’agisse d’un robinet en ville ou au milieu d’un champ, d’une rivière ou d’un cours d’eau canalisé, ce n’est pas parce qu’il y a de l’eau qui coule avant le dîner qu’il y en aura une heure après au moment de faire la vaisselle.
En cas de coupure il y a en gros trois solutions :
- vous avez anticipé et mis de l’eau en réserve pour la vaisselle. Bien joué !
- vous compter sur la chance « Non mais il y aura de nouveau l’eau demain matin » et donc remettez au lendemain ce que vous ne pouvez pas faire le soir même
- ou alors vous pouvez pratiquer un mélange de vaisselle “slurp” (chaque convive a la responsabilité de lécher parfaitement ses couverts) et de vaisselle “PQ” (un bon essuyage des assiettes et de la casserole avec du papier hygiénique, après tout c’est conçu pour essuyer).
Par température négative
Attendez l’hiver pour tester cette variante ! Coupez le chauffage et ouvrez grand les fenêtres. Ou alors sortez dans le jardin tout simplement. Profitez d’un soir venteux, quand le soleil est déjà couché.
Au préalable vous aurez pris soin de stocker un à deux litres d’eau dehors, afin qu’elle soit parfaitement froide. Allez-y : mettez les mains dans l’eau froide, mouiller vos manches. Si une fine pellicule d’eau gèle instantanément au fond de la casserole, c’est que toutes les conditions sont réunies ! Vous pouvez toujours essayer de la gratter avec votre vieille éponge fatiguées, ça ne sert à rien. Vous êtes bon pour finir le lendemain matin avant de faire chauffer de l’eau pour le petit déjeuner.
Dans des thermes
Variante grand luxe : identifiez la source primaire, celle par laquelle sort de l’eau bouillante. Laissez l’éponge là où elle est rangée. Puiser de l’eau à l’aide de la casserole (attention à ne pas la faire tomber, elle serait difficilement récupérable). Faire tremper la vaisselle, rincer avec de l’eau bouillante, laisser sécher. Profitez de la vue sur les montagnes.
Trucs et astuces
Gardez l’eau de cuisson pour la vaisselle. Si vous mangez assez vite et qu’il ne fait pas trop froid, vous pourrez faire la vaisselle à l’eau chaude
Ne cuisinez pas trop gras. Par exemple : évitez la soupe de truite associée à la variante « température négative » sous peine de boire une infusion feuilles de coca/truite au petit-déjeuner.
